L’absinthe, surnommée la "fée verte", possède une histoire riche et mouvementée qui débute à la fin du XVIIIe siècle.
Les Premiers pas de l’absinthe
C’est dans le Jura suisse qu’est née cette boisson singulière, grâce à la mère Henriod, qui élaborait un élixir à base d’absinthe, d’anis vert et de fenouil dans sa cuisine. Vers 1792, le docteur Pierre Ordinaire popularise cette préparation comme remède à base de plantes. Le major Dubied, voyant son potentiel, en acquiert la recette en 1797 et s’associe avec Henri-Louis Pernod. Ensemble, ils fondent la première distillerie d’absinthe, perfectionnant la recette avant de s’installer en France en 1805 avec la maison Pernod et fils.
L'Âge d’Or et la popularisation en France
L’absinthe s’impose d’abord auprès de la Légion étrangère en Algérie, utilisée pour purifier l’eau et prévenir les maladies. Rejetée par les soldats lors de leurs permissions, elle gagne ensuite les cafés parisiens dès les années 1840, notamment dans les quartiers bohèmes comme Montparnasse et Montmartre. Ce breuvage devient rapidement un symbole culturel du XIXe siècle, adoré par les artistes et intellectuels tels que Van Gogh, Hemingway ou Wilde. Consommée lors de "l’heure verte", elle est réputée pour stimuler la créativité et l’inspiration.
Le phylloxéra, ravageur des vignobles, accentue sa popularité, l’absinthe remplaçant temporairement le vin. Progressivement, la boisson devient accessible à tous, s’ancrant dans les habitudes sociales, notamment au sein de la classe ouvrière. De remède médicinal, elle se transforme en un rituel convivial partagé dans les nombreux bistrots parisiens.
Crise et controverses à la fin du XIXe Siècle
Avec son succès, la qualité de l’absinthe baisse, certains produits sont frelatés, ce qui entraîne des abus. L’absinthe est alors associée à des troubles psychiques et à la folie, alimentant des campagnes virulentes menées par les ligues anti-alcooliques. Accusée d’être la cause principale de l’alcoolisme, elle devient le symbole d’un fléau social, malgré la consommation généralisée d’autres alcools forts à cette époque.
Cette stigmatisation conduit à une chute de sa réputation et de son prix. Le 16 mars 1915 marque un tournant décisif avec l’interdiction officielle de l’absinthe française. Les distilleries ferment, les plantations sont détruites, et la "fée verte" est reléguée au rang de "péril vert".
Interdiction, Oubli et Réhabilitation
L’absinthe est bannie dans plusieurs pays au début du XXe siècle, en raison de la thuyone, composant naturellement présent dans la plante et soupçonné de provoquer hallucinations et troubles mentaux. Pourtant, des recherches récentes ont relativisé ces dangers, considérant ces peurs comme largement exagérées.
Après près d’un siècle d’interdiction, la fin des années 1990 voit un retour progressif de l’absinthe, avec une réglementation stricte sur sa composition et sa fabrication, permettant une consommation encadrée et sécurisée.
La Fée Verte aujourd’hui : Un retour triomphant
Aujourd’hui, l’absinthe bénéficie d’un regain d’intérêt à l’échelle mondiale, porté par la mode des spiritueux artisanaux et authentiques. Produite dans divers pays, elle offre une large palette de recettes mêlant traditions ancestrales et innovations modernes.
Les distilleries artisanales perpétuent cet héritage en élaborant des absinthes de qualité, respectant les méthodes classiques tout en valorisant un savoir-faire unique. L’absinthe, symbole d’une époque mythique, séduit à nouveau les amateurs de spiritueux grâce à son histoire fascinante et son goût inimitable.
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